« Vaut mieux être crucifié pour la vérité que de crucifier la vérité ». Cette célèbre phrase de feu le cardinal Malula traduisait ses convictions profondes d’homme de foi, de témoin de l’Évangile du Christ, dans une Afrique alors à la croisée des chemins, en quête de vraie liberté et de développement intégral, d’égale justice pour tous et de paix réelle. Il n’est pas donné de voir la vérité en honneur tous les jours dans nos sociétés où la réalité semble prêcher que la corruption paye vite et gros, donne de l’ascenseur et enrichit facilement. Combien de personnes autour de nous ne croient-elles pas que le bonheur se réduit à l’avoir, à la possession de plusieurs biens, quels que soient les moyens empruntés. Ils vivent en fonction de cela et sont prêts à tout pourvu qu’ils atteignent leurs objectifs.
De la sorte, ils trouvent leur orgueil en ce qui devait plutôt faire leur honte. En réduisant leur gloire dans les biens de ce monde (cf. Ph 3,18-20), ils perdent de vue que « tout est vanité » (Qo 1,2), que nous ne sommes que pèlerins sur cette terre et que ce monde passe. En effet, elles sont trompeuses les belles figures, les convoitises et les jouissances de cette vie terrestre (cf. Lc 12,20-21). Pourtant, c’est par et pour elles que des hommes et femmes de tout temps ont été tentés de « crucifier la vérité ». Même Jésus en a fait l’expérience (cf. Lc 4,1-13).
Le Bon Dieu ne nous a pas créés ni donné ce beau monde pour y vivre miséreux ; il n’aime pas ceux qui sont là à ne rien faire, sans enthousiasme ni rêve ou projet de vie. Les ambitions sont bonnes, pourvu qu’elles soient saines, nobles et au service de la vie ; le pouvoir est utile puisqu’aucune communauté humaine ne peut tenir sans chefs, pourvu qu’il soit bien acquis et serve le bien commun. C’est humain que de réclamer d’être reconnu dans ses droits, d’être respecté et valorisé, pourvu qu’on ne prétende pas à se faire adorer comme un dieu. Le « Pain », le « Prestige » et le « Pouvoir », voilà trois autels sur lesquels la vérité se trouve régulièrement sacrifiée.
N’applaudissons pas tout et tout le monde sans discernement éclairé. N’approuvons pas tout beau discours, n’adhérons pas à toute proposition sans jugement équilibré. Refusons d’affirmer ce que nous savons être faux. Ne professons que ce que nous croyons. Le bien ou le mal, appelons-le par son nom. Car, le bien reste le bien, le mal reste le mal. Il n’y a pas et il ne peut y avoir des compromis entre les deux. Là où la vie humaine est bradée pour quelques intérêts égoïstes, le silence peut devenir coupable parce que complice. La souffrance et la mort multiforme des innocents ne sauraient être cautionnées par un disciple de Jésus, qui est venu pour que nous ayons la vie en abondance (cf. Jn 10,10), pour « rendre témoignage à la vérité » (Jn 18,37). C’est la mission de l’Église, des hommes et femmes d’Église, jeunes et adultes, tous « prophètes » de par leur baptême, de continuer de marcher sur les pas de leur Maître, Jésus, « Voie, Vérité et Vie » (Jn 14,6).
Pour autant que la vérité place les gens devant leurs responsabilités, on comprend qu’elle bouscule et dérange certaines consciences. Les prophètes ne tiennent bon que si grande est leur espérance, si ferme est leur foi en la résurrection des morts et en la vie éternelle. Heureux ceux qui craignent Celui seul qui a le pouvoir de conduire à la géhenne (Mt 10,28) ! Heureux sont-ils car par leur persévérance ils auront la vie et donneront la vie. La souffrance et le sang des « martyrs » de la vérité, d’hier comme d’aujourd’hui, fleurissent et fructifient toujours.
Il faut y croire et refuser d’édulcorer ou de trahir la vérité, quel que soit le prix à payer.
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